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samedi 19 mai 2012

Je nage donc je suis.

Un. Deux. Trois, Quatre mouvements. Souffler. La marque au fond de la piscine. Respirer. Allonger le bras. Attention à la rentrée dans l'eau. Casser le coude. Pousser. Un. Deux. Trois. Quatre mouvements. Souffler. La marque est un peu loin; il faut que j'allonge.

Quand on doit se taper 2,5 km de natation soit 50 aller-retour, 100 longueurs (!!!!), on a le temps de penser à autre chose. Enfin presque, car la natation a cela de chiant que l'on doit faire attention sans cesse à ce que l'on fait afin de pouvoir avancer assez rapidement en faisant le moins d'effort. Car le but du jeu est d'abord que cela dure le moins longtemps possible. D'autant plus que les piscines sont toutes construites en pentes. A l'aller on descend et c'est rapide. Au retour, cela monte et je soupçonne certaines d'avoir un courant contraire qui rend les choses encore plus difficiles.

Un. Deux. Trois, Quatre mouvements. Souffler. La marque au fond de la piscine. Respirer. Le mur arrive. Arrêt mouvement. Culbute. Replier les jambes. S'appuyer sur le mur. Pousser.

Ce qu'il a bien à la piscine, c'est que l'on ne peut pas tricher. Quand on est jeune, on a tendance à regarder la taille des sifflets; on compare la longueur et la largeur sous les douches. A l'âge mûr, on regarde qui a la plus grosse bedaine. Le moindre bourrelet est tout de suite repéré par les habitués. C'est simple on peut cacher à sa femme pendant quelque temps que l'on a abusé des pizzas. Pas aux nageurs. Sous l'eau, on peut voir que la poussée d'Archimède fait bien son boulot. Il y a toujours, bien évidemment, cette race haïssable de personnes qui, quoi qu'elles ingurgitent, restent minces et affichent insolemment leur ventre plat.

Un. Deux. Trois, Quatre mouvements. Souffler. La marque au fond de la piscine. Respirer. Allonger le bras. Attention à la rentrée dans l'eau. Casser le coude. Pousser.Je suis à combien là? 350 ou 400 ? Je ne me souviens plus. Suivant la fatigue je choisis l'un ou l'autre.

La plaie ce sont les palmistes (qui ne sont pas des palmiers fumistes mais des humains). Je ne parle pas de ceux qui utilisent des mini-palmes pour faire des fondamentaux. Ce sont les autres, ceux qui ont de grosses palmes et qui prennent la ligne d'eau comme s'ils étaient seules. Les palmistes sont les conducteurs de 4X4  des piscines.
Il a ensuite le nageur moyen qui ne regarde pas derrière lui quand il arrive au mur et qui se déporte alors que vous êtes en train de le doubler. Il y a quelques jours, je donnais le conseil de jeter un coup d'oeil derrière elle à une petite dame qui m'avait coupé la route par deux fois. Je ne comprenais pas son regard crispé car je n'avais aucune intention d'être agressif. Quant elle repartait pour continuer ses longueurs, un autre nageur me dit : "Tu sais qui c'est?", "Non", "C'est la femme dont le mari à tenté de la tuer. Elle ne nage plus qu'avec un poumon". Un triton passe.
Le pire reste le papy ou la mamy qui n'ont pas compris que les lignes sont réservées au bons nageurs. Résultat des collisions en série car ils ne respectent pas le sens de nage jusqu'à ce qu'un MNS (Maître Nageur Sauveteur pas les bonbons au chocolats) vienne lui suggérer d'aller nager plus loin.

Un. Deux. Trois, Quatre mouvements. Souffler. Respirer. La marque au fond de la piscine est loin. J'ai beau avoir l'impression de pousser autant ma nage est de moins en moins efficace.

Je nage avec Jean, 62 ans, qui fait 2 km par séance. Cela peut sembler beaucoup mais en fait, jusqu'à peu, il faisait la même distance en 2 séances. Il ne fait plus qu'une séance depuis le changement de concessionnaire qui a gagné la DSP (Délégation de Service Public). Il faut savoir que les collectivités locales veulent de moins en moins s'occuper des services publics. Le néo-libéralisme a gangrené les esprits et les gens ne veulent payer que ce qu'ils consomment. Ainsi les non-nageurs ne veulent pas payer pour les nageurs, les non footballeurs ne veulent pas payer pour les footballeurs, etc …
Les collectivités locales sont généralement propriétaires des équipements. Elles délèguent l'exploitation des équipements à des sociétés privées. Elles allouent une redevance aux délégataires. Dans la petite tête des élus en charge de l'appel d'offre, ce qui importe c'est que la redevance soit la plus faible possible. Cette gestion myope des fonds publics conduit: au doublement des tarifs notamment pour ceux qui viennent régulièrement, des licenciements, une eau plus froide, des problèmes d'ouverture (pas assez de chlore, un seul maitre-nageur). Ce qu'il y a de rageant est le mépris dont fait montre les élus en charge du dossier. Vous les interpelez et ils vous renvoient sur le délégataire qui n'en peut mais dans la mesure où il est dans sa logique. Ces beaux messieurs ou dames, qui ont sollicité notre suffrage, ignorent leurs administrés une fois élus.

Un. Deux. Trois, Quatre mouvements. Souffler. La marque au fond de la piscine. Respirer. Allonger le bras. Attention à la rentrée dans l'eau. Casser le coude. Pousser. Tiens un gars qui fait du fractionné. Je vais essayer de le suivre.

Il y a deux catégories de nageurs. Il y a les bons nageurs et les mauvais nageurs. Les bons nageurs nagent et les mauvais nageurs …. euh … nagent aussi mais ce sont des mauvais nageurs.
Je n'arrive pas à faire une activité sans garder un certain esprit de compétition. Lorsque je vois un nageur sur la ligne adjacente qui est en train de me doubler, j'ai tendance à vouloir le suivre. Le problème est que je fais des longues distances donc j'ai déjà dépassé les 1 000 m alors que l'autre fait des séries de 100 m à fond (c'est le fractionné). Si l'on rajoute le fait que mon adversaire a 30 ans de moins que moi et est un vrai nageur, je me retrouve à courir après ma jeunesse (avant que cela soit après mon souffle). Dans ce cas là, je ne sens plus mon épaule ce qui est une drôle d'expression pour dire que je ne sens que la douleur dans l'épaule. Une fois, j'ai réussi à résister. Cela m'a donné un gros coup de fierté et trois semaines d'arrêt pour m'en remettre.

Dernier cinquante mètres. Je donne tout c'est à dire plus grand chose. J'ai beau accélérer, respirer qu'une fois tous les huit battements, j'ai l'impression de faire du surplace. Le mur semble reculer à mesure où j'avance. J'ai le coeur qui va me coiffer sur le poteau tellement il a envie de sortir. La pente du bassin s'est accentuée; elle fait au moins du 10%. Un. Deux. Trois. Quatre mouvements. Je touche le mur. C'est fini… jusqu'à la prochaine séance dans deux jours.

4 commentaires:

  1. Je suis épuisée, l'impression d'avoir nagé! :-) Excellent ta manière d'embarquer le lecteur dans l'eau...Bravo! (ça ne va pas me convaincre d'aller nager cependant : l'eau, ça mouille)

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  2. Merci pour le commentaire. Il faut ce qu'il faut pour garder la forme. Demain direction la piscine.

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  3. Quel courage ! J'aime nager mais l'été..... Sous le soleil.....

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    1. Hello, Tu ne l'avais pas encore lu. Là je suis à 9km/semaine. En revanche je ne nage quasiment pas dans la mer alors qu'elle toute proche.

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